La direction diocésaine de Caen a organisé avec ATD Quart Monde une formation pour les enseignants, les chefs d’établissement et les personnes vivant dans l’extrême pauvreté. Objectif : se connaître pour mieux ouvrir l’école à tous.
Si le nouveau Statut de l’enseignement catholique rappelle dans plusieurs articles que les établissements doivent s’ouvrir à tous les élèves, comment passer de la théorie à la pratique ? Tel est le point de départ d’un projet mené par la direction diocésaine du Calvados avec le mouvement ATD Quart Monde. Du 8 au 11 avril 2014, trois groupes homogènes – un de professeurs, l’autre de directeurs, le troisième de femmes en grande précarité – ont travaillé sur leurs représentations mutuelles en utilisant la technique du croisement des savoirs (cf. encadré). Ils ont ensuite confronté leurs réponses et ont essayé de comprendre comment se rapprocher les uns des autres, tant les malentendus sont importants… « Derrière les mêmes mots, nous ne mettons pas les mêmes choses, explique Agnès Pasquier, enseignante référante pour l’accueil d’élèves en situation de handicap au collège Saint-Jean-Baptiste-de-la-Salle de Lisieux. Nous parlons par exemple de personnes en situation de faiblesse. Ces dernières refusent le terme et préfèrent mettre en avant le courage dont elles font preuve pour sortir de la pauvreté. »
Oser la confrontation
Nombre d’exercices ont par ailleurs mis l’accent sur les comportements et postures. Trop souvent les enseignants et chefs d’établissement finissent les phrases à la place des parents ou ne vérifient pas si le message a bien été compris. De leur coté, les militantes d’ATD Quart Monde n’osent pas demander de répéter ce qui vient d’être dit, développer leurs argumentations ou encore se faire accompagner par une tierce personne en cas de besoin.
« Même avec toute notre bienveillance, nous faisons des erreurs car nous ne maîtrisons pas les codes, ajoute Béatrice Josse, directrice de l’école Saint-Joseph à Livarot. Je ne comprenais pas pourquoi certains parents ne nous regardaient pas quand on les recevait pour nous entretenir de leurs enfants. Les militantes d’ATD Quart Monde m’ont répondu qu’il fallait que je le leur demande car d’elles-mêmes, elles ne lèvent pas les yeux de peur d’être jugées… »
« La bonne volonté ne suffit pas. On s’aperçoit qu’en dehors même de la connaissance des codes, il faut du temps pour engager un véritable dialogue », reconnaît Agnès Pasquier. « Ce qui suppose de redonner la priorité au sens sur l’action », insiste Nathalie Charlier, directrice de l’école Saint-Joseph à Deauville. « Au terme de cette formation, il y a moins d’incompréhension car nous avons osé la confrontation », conclut Frédérique Ygouf, directrice de l’école et collège Saint-Michel à Hérouville-Saint-Clair, transformée par cette expérience qu’elle souhaite partager dès son retour avec l’ensemble de son équipe…