Groupe d'élèves

Accompagner l’orientation

Lycée Saint-Pierre, Bourg-en-Bresse (01)
Olivier Hautier, Chef d’établissement
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À l’institution Saint-Pierre de Bourg- en-Bresse (Ain), l’équipe éducative accompagne chaque lycéen grâce à un parcours d’orientation « maison » et un coaching personnalisé. Plus qu’un dispositif, un état d’esprit…

Depuis septembre dernier, les élèves de 2de de l’institution Saint-Pierre de Bourg-en- Bresse (Ain) expérimentent deux heures chaque lundi midi au contenu inédit. « Ce que l’on veut travailler avec vous, cela n’est pas une compétence technique, c’est vous-même, votre attitude, votre langage. L’enjeu, à travers le photolangage aujourd’hui et d’autres d’ateliers plus tard, c’est de vous tendre un miroir pour vous aider à mieux vous connaître. Vous êtes en 2de, avec plein de rêves : que faites- vous pour les atteindre ? », interroge Anne-Sophie Revoirard, professeur d’éducation physique et sportive et référente de l’« accompagnement coaching » au lycée. L’initiative participe d’un projet global d’« accompagnement personnalisé » développé depuis 2011 pour les lycéens de Saint-Pierre de la 2de à la Terminale.

À l’origine, un constat : celui de la difficulté croissante des élèves de ce lycée très calme de centre-ville à s’organiser dans leur travail, et en réponse, le réflexe des parents de se tourner vers des cours particuliers. Autant de « béquilles » qui restent sans effet sur le fond. D’où cette volonté de l’équipe que l’École puisse être son propre recours. « Le lycée, c’est trois ans pour préparer à l’enseignement supérieur l’élève, mais surtout la personne que l’on est. Ce que l’on veut, c’est favoriser le développement de chaque jeune dans toutes ses dimensions ! », expose selon Françoise Gras, directrice générale de l’institution. Et pas seulement l’obtention du bac, comme l’ambitionne le dispositif d’accompagnement personnalisé prévu par la réforme du lycée de 2010, surtout axé sur l’aide à la méthodologie, à l’orientation et l’accompagnement matières.

Établissement pilote lors de sa mise en place, Saint-Pierre avait déjà introduit des entretiens d’explicitation – toujours en vigueur – et formé ensemble professeurs principaux de seconde et personnels de vie scolaire pour accompagner l’élève dans une relecture de ses pratiques de réussite.

Depuis 2011, la démarche se veut encore plus systémique. « Cela commence dès l’inscription. Avant les bulletins, on regarde la motivation des jeunes. Ce qui frappe, c’est leur difficulté à prendre conscience des compétences qu’ils ont pu développer au-delà du cadre scolaire et qui peuvent être mobilisées pour leur scolarité ! Notre objectif, c’est qu’ils puissent s’en servir dans la construction de leur parcours », insiste Nathalie Ferrier, directrice adjointe.

Dans cette optique a émergé l’idée d’un coaching pour toutes les classes de 2de (sept au total, soit plus de 220 élèves), qui intègre deux dimensions bien distinctes. Un suivi individualisé d’une part, assuré par le professeur principal de la classe, composé de deux temps d’entretiens individuels en début et fin d’année sur les objectifs personnels de réussite du jeune, ainsi que d’un travail avec lui sur la question de son orientation. Des ateliers en demi-groupes d’autre part, obligatoires pour certains (sur le savoir-être, sur les valeurs nécessaires à la réussite, sur la place de l’autre ou encore la rédaction d’un Cv, sur la confiance en soi et l’aisance à l’oral), au libre choix des élèves pour d’autres (concentration, méthodologie, accompagnement matières, english talk…). Ils sont animés par des professeurs et – nouveauté depuis cette année – l’adjoint en pastorale.

« L’idée de ce cheminement, conçu avec des coachs sportifs, est de travailler au niveau de l’élève et de la dynamique de groupe pour permettre à chacun de trouver sa place au sein de la classe, et au-delà, précise Anne-Sophie Revoirard qui l’a élaboré avec ses collègues professeurs principaux de seconde. Il y a tant d’élèves brillants scolairement qui reçoivent les félicitations au conseil de classe alors que sur le plan non-verbal, on les voit mal dans leur peau, introvertis, repliés derrière leurs écouteurs dans la cour. Une fois dans le monde du travail, comment feront-ils ? »

« C’est un tremplin pour la vie »

Pour les accompagner, le module orientation inscrit dans le cadre de ce coaching revêt un caractère « maison » bien particulier. Créé par trois enseignants du lycée et mis en partage sur le serveur, il propose une progression en huit séances d’une heure par niveau de la 2de à la Terminale. « L’idée est de se donner le temps de se poser, loin du stress familial et social, avec le maximum d’outils et de ressources pour affiner ses envies, identifier les éventuels freins, se confronter progressivement à la faisabilité de son projet, et sortir surtout de cet attentisme chez les élèves qui voudraient qu’on leur trouve leur métier ! », indique Gilles Robin, enseignant de sciences de la vie et de la Terre et co-concepteur du module.

Un autre enjeu de ce parcours de déter- mination, ainsi que des « mardis de Saint-Pierre », organisés trois fois par an avec l’amicale des anciens élèves et l’association des parents, est l’ouverture et la confrontation au réel. « Même si les élèves ont déjà leur projet, ces temps de rencontre avec des professionnels (90 intervenants sur 3 soirées représentant 15 secteurs d’activité, ndlr) – à ne pas confondre avec un forum métier – veulent susciter la curiosité et leur permettre d’envisager des parcours de vie plutôt que des carrières, souvent tout sauf linéaires ! », insiste véronique Combes, vice-présidente de l’Apel du lycée. De quoi donner confiance pour inventer sa propre trajectoire, estiment Païkan et Sixtine, 17 ans, en Terminale ES : « On nous aide à avoir un retour sur nous-même, à identifier nos besoins, à approfondir nos compétences, c’est beaucoup plus qu’un accompagnement jusqu’au bac et au revoir ! C’est un tremplin pour la vie. »

La systématisation du tutorat depuis 2013 vient compléter le dispositif.
« Ce ne sont pas nécessairement des élèves en difficulté qui y font appel mais tous expriment le besoin d’un apport spécifique sur le plan de la motivation ou pédagogique. L’intention est à la fois l’autoréflexivité et l’autonomie : permettre au jeune de parler de lui-même avec à ses côtés un enseignant (une dizaine au total, tous volontaires, ndlr) qui l’aide à trouver les ressorts sans faire à sa place », indique Maryse Clair, enseignante d’anglais et coordinatrice du dispositif, qui fait état d’un nombre d’heures de la 2de au BTS – financées par l’enveloppe indemnitaire de l’établissement – en forte croissance.

Des enseignants formés

Pour favoriser la montée en compétence des enseignants dans cet accompagnement et faire lien entre les différentes actions composant la démarche, le plan de formation de l’établissement a fait du sujet sa priorité numéro un depuis 2011, sans oublier la mise en place d’un accompagnement personnel des professeurs par la direction. « Il y a d’abord eu une formation au tutorat (une quinzaine d’enseignants au total, ndlr), puis au coaching pédagogique pour les professeurs principaux de seconde suivie d’une formation commune entre professeurs principaux et tuteurs en 2015-2016, soit au total plus de la moitié des professeurs de l’établissement formés (une trentaine, ndlr) », détaille Nathalie Ferrier. Depuis la rentrée, de l’analyse de pratiques est également proposée aux enseignants et personnels volontaires, dont la référente du tutorat, qui suit une formation professionnalisante à titre personnel, a la charge. « On voudrait que la démarche innerve toute l’institution et que se forme une chaîne de compétences autour des élèves », marque Françoise Gras.

Un objectif en bonne voie, se réjouit Maryse Clair : « On observe déjà aujourd’hui un autre point de vue sur les élèves, perceptible dans les évalua- tions sur les bulletins ou en conseil de classe, qui tient compte aussi de « l’intérieur » du jeune et de ce qui peut l’empêcher d’avancer. » Et une confiance qui s’affirme chez les lycéens, qui ont reçu l’an dernier quelques 600 « diplômes » maison consacrant l’un de leurs talents (implication dans le journal du lycée, action caritative, engagement sportif, etc.). De quoi enrichir leur dossier scolaire d’une note plus personnelle.