Réinventer l’espace pour mieux apprendre

Institut Saint-Joseph, Saint-Martin-Boulogne (62)
Philippe DESCAMPS, Chef d'établissement Marc Brachet, Directeur des services généraux
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Un amphithéâtre ouvert sur le monde, une agora connectée, un centre de culture et de connaissances, véritable CDI du futur… À Saint-Martin-Boulogne, dans le Pas-de-Calais, après un an de travaux, l’institut Saint-Joseph offre un nouveau visage très attrayant.

Le monde change, Saint-Jo aussi. » Il aura fallu cinq ans de travail acharné à Philippe Descamps, directeur de l’institution Saint-Joseph, à Saint-Martin-Boulogne (62) pour transformer ce lycée – une « institution » sur la Côte d’Opale depuis 1912. L’établissement compte plus de 1 400 élèves, de la 3e à bac+5, entre les lycées professionnel, général et technologique, le campus post-bac, la formation continue et l’apprentissage. Un cahier des charges de trente-deux pages résume toutes les ambitions de la métamorphose, à la croisée des préoccupations environnementales, des évolutions sociales notamment numériques, des visées du conseil régional en matière de formation professionnelle, mais aussi des attentes des familles et bien sûr des nouvelles pratiques des jeunes.

5 M d’euros de travaux

Le projet, intitulé « Cap 2020 », décortique les évolutions attendues, résultat d’un « investissement de toutes les personnes, qui a donné du fruit et permis l’évolution de l’institution au service des jeunes, des familles, du monde économique, et plus généralement du projet chrétien que nous invite à porter l’Église », note le chef d’établissement dans le préambule du document. Il faut dire que le montage financier engage Saint-Jo sur vingt ans. Le coût total des travaux, de 5 millions d’euros, a été subventionné à hauteur d’1,8 million d’euros par le conseil régional, le reste ayant été apporté par un emprunt bancaire de 3 millions (le solde provenant de l’autofinancement). En un an de travaux, le lycée Saint-Joseph a refondu quasiment la moitié de ses espaces. Une fois passée l’entrée (qui offre un accès plus sécurisé que le trottoir historique situé sur un axe de circulation très fréquenté par les voitures), on franchit une cour fermée pour atteindre le seuil de l’établissement, matérialisé par une immense baie vitrée où chaque élève est invité à badger. Le couloir, bleu et jaune aux couleurs de l’institution, conduit à la Learning Plaza, littéralement « place apprenante », qui se veut un espace « d’enseignement informel et d’apprentissage », équipé d’un réseau WiFi et de nombreuses prises de courant. C’est le coeur du lycée, un lieu hybride pour se rencontrer, faire une pause, manger mais aussi échanger et travailler. Le mobilier est adapté à ces différents usages : les élèves peuvent choisir entre des canapés ou des tables de travail modulables, au design moderne et coloré. « L’idée était de répondre aux besoins de travail nomade des adolescents. On peut y continuer un devoir ou un exposé qui n’aurait pas été terminé à la maison, seul ou en groupe, mais aussi se retrouver entre copains », souligne Philippe Descamps. « C’est aussi un lieu qui permet d’interpeller les enseignants, puisqu’ils y passent forcément pour rejoindre la salle des professeurs et du personnel située à l’étage au-dessus, ajoute Marc Brachet, le directeur des services généraux. Les élèves peuvent ainsi interroger un professeur sur une consigne qu’ils n’ont pas comprise ou demander une explication complémentaire. »

Un amphi XXL

Dans le prolongement de la Learning Plaza, se trouve le centre de culture et de connaissances, un CDI nouvelle version plus ouvert et moins règlementé. Très concrètement, on peut y boire un café ou manger un sandwich en feuilletant un ouvrage. « Cet endroit a pour vocation d’exposer le livre au lieu de le protéger », résume Philippe Descamps. « L’aménagement a été conçu pour que plus on avance dans l’espace, plus les lieux de vie se restreignent, en offrant toujours plus d’intimité », détaille Marc Brachet. Dans le fond, une petite salle est équipée d’un tableau blanc et d’un écran interactif, particulièrement bien adapté au travail de groupe.

« Auparavant, cet espace était occupé par des salles de classe, fait remarquer le responsable. Nous avons voulu en faire un outil pour travailler avec les enseignants, en renforçant l’équipe d’un documentaliste avec un autre mi-temps. » Même s’il est difficile d’évaluer l’impact de ces changements avec les récentes restrictions de jauges dues à la pandémie, Virginie Tripier-Martheau, professeur documentaliste, perçoit que les élèves sont « vraiment très contents de disposer d’espaces plus confortables, pour bouquiner dans le canapé, par exemple ». Pour elle, cet aménagement correspond davantage aux façons de travailler d’aujourd’hui. « Nous disposons aussi d’un espace dédié à la presse, plus fonctionnel : nous avons, par exemple, six mois d’archives accessibles directement par les élèves, qui n’ont plus à nous solliciter pour consulter un ancien numéro, poursuit-elle. Par ailleurs, notre rayonnage “lecture-plaisir” s’étoffe de plus en plus, avec notamment une belle collection de mangas. » Le « 3C », diminutif de Centre de culture et de connaissances, peut également accueillir un club jeu sur le temps de midi ou une exposition temporaire. « Comme le mobilier est mobile, il nous est possible de réaménager entièrement l’espace en fonction des évènements », s’enthousiasme l’enseignante. À l’opposé du 3C, sur le même niveau, il y a le « clou » des travaux. Un magnifique amphithéâtre de 300 places. « Avec son écran géant, c’est le top. Quand on a cours à plus de quarante élèves, c’est beaucoup plus confortable », constate Simon, en Tle STI2D. D’autant que la salle permet d’imaginer bien plus que des cours magistraux. On peut projeter un fi lm, assister à une représentation théâtrale, organiser un concert ou accueillir les entreprises partenaires, l’établissement ayant gardé depuis sa création un lien fort avec le tissu économique local. « L’idée est aussi que les jeunes aient un espace pour mettre en avant leurs talents », expose le chef d’établissement. La responsable de l’alternance post-bac, Géraldine Leroy, constate quant à elle que les nouveaux locaux « contribuent à réduire le fossé avec le monde de l’entreprise ». Les alternants « apprécient de se retrouver librement, sans la contrainte de pousser la porte », pointe l’un d’eux, tout comme les tuteurs venant de l’extérieur ou les professionnels qui participent à un jury de concours. « Le nouvel aménagement permet de sortir du contexte sacralisé de la salle de classe et de transformer l’approche pédagogique », conclut Géraldine Leroy.