classe d'élèves

Faire classe autrement

Institution Notre-Dame de Lancrel, Alençon (61)
Annick Leroy, chef d’établissement
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L’Institution Notre-Dame, à Alençon (Orne), a mis en place depuis cinq ans un dispositif original : les élèves travaillent par groupes de compétences en 6e et les enseignants d’une même matière interviennent en duo, une heure par semaine, de la 5e à la 3e.

Comment mener sa classe en faisant progresser les collégiens les plus lents sans pénaliser ceux qui vont plus vite ? L’Institution Notre-Dame, à Alençon, a trouvé la réponse : les soixante-dix élèves des trois classes de 6e sont répartis pour les cours de français, mathématiques et anglais en « groupes de compétences et de besoins ». Une répartition qui pourra être revue au cours de l’année en fonction du ressenti des élèves.
Une quinzaine d’entre eux sont dans le groupe 1, rassemblant ceux qui ont le plus de difficultés ;

À chacun selon ses besoins

À l’issue du cours de mathématiques, Adrien, en groupe 1, ne tarit pas d’éloges sur la méthode : « On apprend autrement et on est moins perdu », explique-t-il, après s’être initié à l’apprentissage des fractions. Ici, pas d’exercices au tableau, mais un jeu de cubes de couleurs et de dimensions différentes représentant des fractions. Assis sagement, le groupe écoute l’en- seignante et répond à ses questions. Joris se lance : « Un huitième, c’est la pièce marron ! » La professeur, Cécile Letertre, rectifie : « Il ne faut pas uniquement se fier aux couleurs ! », incitant Joris à regarder aussi les dimensions. Une heure plus tard et quelques salles de classes plus loin, Guillaume, dans le groupe 3, suit studieusement le cours de français. La leçon du jour porte sur les Fables de La Fontaine. Outre la lecture des textes, l’enseignant apporte des compléments d’information sur le règne de Louis XIV et sur le rôle des mécènes, tel Nicolas Fouquet, le surintendant des finances du roi, et protecteur de l’écrivain. Eugénie ne manque pas une miette de ces explications. « J’aime pouvoir ainsi approfondir ! », s’exclame la collégienne.

« Cette façon de s’adapter à la diversité des élèves ne s’arrête pas en 6e. De la 5e à la 3e, ces groupes de compétences sont remplacés par des séances de co-intervention », poursuit Annick Leroy. Toujours en français, en mathématiques et en anglais et pendant une heure par semaine, deux enseignants de la même matière se retrouvent pour faire cours devant les élèves. Ce dispositif a pu voir le jour grâce à une dotation horaire reçue au titre de l’égalité des chances et de la réussite éducative.vingt-cinq font partie du groupe 2 et suivent le programme normalement ; enfin, la trentaine d’autres jeunes, en groupe 3, se voient proposer davantage d’exercices les incitant à aller toujours plus loin. « Les élèves du groupe 1 bénéficient, en outre, d’une heure hebdomadaire sup- plémentaire pour aller à leur rythme et effectuer le travail personnel du soir accompagné par le professeur », mentionne Annick Leroy, la chef d’établissement.« Pendant cette heure, le professeur co-intervenant peut ainsi apporter une aide supplémentaire aux jeunes en difficulté, sans interrompre le cours. Cela est très utile car nous avons chacun notre façon de présenter les choses. Nous utilisons aussi la présence d’un collègue pour monter des projets que nous ne pourrions pas faire seuls », met en avant Cécile Edely, professeur d’anglais.

Rôles inversés

Profitables pour les collégiens, ce pro- jet intéresse aussi les enseignants qui apprécient cette façon de travailler en équipe. D’autant que les rôles sont par- fois inversés. « On peut être professeur principal dans une classe et co-inter- venant dans une autre. Cela nous permet de mieux connaître nos collègues, de renouveler nos pratiques mais aussi d’avoir un point de vue sur l’ensemble des élèves », ajoute Isabelle Santi, professeur d’anglais.
Après cinq ans de mise en œuvre, tout le monde, y compris les parents, recon- naît le bien fondé de la méthode, exigeante mais aussi stimulante. « Ce projet a donné une identité propre et une nouvelle dynamique à notre établissement », conclut Annick Leroy.