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A quoi suis-je appelé ?

Lycée Saint-Michel d’Annecy (74)
Francis Marfoglia, professeur de philosophie
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élèves qui étudient
© D.R

Mieux choisir sa voie grâce à des ateliers de connaissance de soi, c’est ce que propose le lycée Saint-Michel d’Annecy (74) à ses 2des. Une démarche initiée par le professeur de philosophie Francis Marfoglia qui séduit d’autres établissements.

Les parents et les enseignants parlent beaucoup des enfants… Mais comment faire pour que ces derniers en disent un peu plus sur eux-mêmes et l’institution un peu moins ? » C’est en se posant cette question que Francis Marfoglia, professeur de philosophie au lycée Saint-Michel, à Annecy (74), a lancé une démarche permettant aux élèves de mieux se connaître. Objectif : les aider à trouver leur vocation, avant même leur orientation. « Le but de l’École est de donner des clés de compréhension du monde et une certaine culture, estime l’enseignant. Mais quel bien peut-on apporter aussi aux jeunes ? S’interroger sur la vocation sans réduire l’École à la professionnalisation, c’est aider les élèves à se mettre en perspective. »

Un atelier admiration

Depuis la rentrée 2008, sous son impulsion, cette réflexion sur l’orientation-vocation s’est concrétisée par la mise en place d’ateliers animés par des intervenants extérieurs. Ils se tiennent en groupe d’une douzaine de lycéens, un mardi sur deux, sur les heures d’activités culturelles prévues dans l’emploi du temps. Au menu : un atelier photolangage, accompagné par une psychologue, où les élèves réagissent devant des images de tous types en commentant leur choix devant les autres ; un atelier théâtre, qui met l’accent sur l’improvisation, où chacun choisit un personnage et parle de ce que ce rôle signifie pour lui ; un atelier d’écriture, à partir d’un sujet proposé, qui met en avant un moment de la vie d’un personnage ; et, plus particulier mais non moins efficace, un atelier admiration, où les lycéens évoquent la personne qu’ils admirent le plus et expliquent pourquoi. « Ces sessions qui révèlent une partie de leur vie intérieure, les conduisent à mener une réflexion justifiant leurs choix et leurs actions, explique Francis Marfoglia. La difficulté est de susciter une parole spontanée et de faire émerger du sens. » Après chaque séance, durant toute l’année scolaire, les lycéens consignent leurs remarques personnelles, voire intimes, dans un carnet mis à leur disposition. « On ramène souvent l’orientation à des filières et des métiers, poursuit Francis Marfoglia. Pour moi, le but est d’identifier le verbe qui correspond à chacun : “soigner”, “aider”, “créer”, par exemple. Une fois ce verbe trouvé, une direction, un secteur d’activité se dessinent. Ensuite, il faut avancer en fonction de ses capacités et des opportunités. Mais l’idée quand on réfléchit à son orientation, c’est avant tout de mettre de la cohérence dans sa vie intérieure. »

« Le monde compte sur vous !»

L’établissement met à disposition des salles, notamment pour l’activité théâtre d’improvisation. Des ateliers se tiennent aussi au BDI-O (Bureau de documentation et d’information sur l’orientation), une création de l’Apel, contigu au CDI de l’établissement. Sa responsable, Véronique Armaingaud, est aussi à la genèse du projet dans lequel elle est très impliquée : « Parce que depuis longtemps, mon cheval de bataille, c’est l’orientation. » Vice-présidente de l’Apel 74, où elle est entrée en 2008, c’est elle qui a présenté Francis Marfoglia au directeur diocésain Paul Garcin et à son adjointe chargée de la pastorale, Françoise Verdonnet, qui ont très vite soutenu la démarche. L’enseignant menait alors son expérimentation avec des 4es du groupe scolaire Démotz-de- La-Salle, à Rumilly, où il exerçait, encouragé par Jean-Luc Bergeret, le chef d’établissement.

Arrivé à Saint-Michel en 2010, Francis Marfoglia y poursuit son projet toujours avec des 4es. « Quatre journées étaient dévolues à des ateliers, se remémore-t-il. Mais les jeunes n’avaient pas tous le même niveau de maturité. » À la demande du chef d’établissement, l’expérience est relancée avec les neuf classes de 2de. « Nous apprenons aux jeunes à voir ce qui vibre en eux, à écouter au-delà du bruit ambiant (parents, médias, copains…) et à se connecter avec leur intériorité, précise Véronique Armaingaud. On part du principe que chacun est appelé à quelque chose. Nous leur demandons : “Quel est le bien que vous voulez apporter au monde, indépendamment de la réussite scolaire ?” Et nous leur disons aussi : “Le monde compte sur vous !”. Ils se sentent ainsi investis d’une responsabilité. Certains rentrent dans la démarche, d’autres moins. On ne connaît pas le fruit qui naîtra de la graine qu’on a semée. »
Cette approche originale a son instrument de mesure : la satisfaction des élèves, globalement contents que l’on s’intéresse à eux autrement que pour leurs notes. Et celle des parents, souvent stressés par des enjeux qui parfois les dépassent. Ce travail a aussi un impact positif sur la vie de groupe. Ces temps de respiration changent le regard des élèves des uns sur les autres et leurs relations s’en ressentent. « C’est une conséquence heureuse que je n’imaginais pas », se réjouit Francis Marfoglia, rendu sensible par sa « scolarité malmenée » aux difficultés de parcours des jeunes. « L’institution juge des bulletins et pas la personne. Il y a des tas de raisons pour lesquelles un enfant n’a pas de bons résultats. Les mauvaises notes découragent, c’est un cercle vicieux. Je reste cartésien, tous les enfants sont également capables. Il faut les aider à savoir pourquoi ils travaillent. »

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